La Tunisie est confrontée à une fuite préoccupante de ses talents, notamment dans les secteurs clés comme l’ingénierie, l’informatique et la santé. Selon l'Institut Tunisien des Études Stratégiques (ITES), 39 000 ingénieurs ont quitté le pays entre 2015 et 2020, et cette tendance s’est intensifiée ces dernières années.
D’après un rapport de l'Ordre des Ingénieurs Tunisiens, environ 6 500 ingénieurs quittent le pays chaque année, ce qui représente près de 80 % des diplômés en ingénierie produits par les universités tunisiennes. Cette fuite massive des talents coûte à la Tunisie près de 650 millions de dinars par an en investissement éducatif perdu. Les secteurs les plus touchés par cette fuite des compétences sont :
Le départ massif des talents tunisiens ne résulte pas d’un facteur unique, mais d’un ensemble de causes interdépendantes. Les défis économiques, les opportunités limitées et l’attractivité des offres internationales sont autant d’éléments qui poussent nos Talents à quitter le pays. Voici les principales raisons expliquant ce phénomène inquiétant :
1. Une insatisfaction salariale persistante
Les ingénieurs et cadres supérieurs tunisiens perçoivent des salaires bien inférieurs à ceux offerts à l’étranger. Un ingénieur tunisien débutant gagne en moyenne 1 200 à 1 500 TND par mois, contre 3 000 à 4 500 euros en France ou au Canada.
2. Un manque de perspectives d’évolution
L’absence de plans de carrière structurés et d’opportunités de progression pousse les talents à chercher ailleurs. Selon l'IACE (Institut Arabe des Chefs d’Entreprise), 71 % des jeunes diplômés tunisiens envisagent de quitter le pays, faute de perspectives.
3. Des conditions de travail peu attractives
La pression au travail, le manque de reconnaissance et des environnements de travail rigides contribuent au désengagement des employés. Selon l’ITES, 78 % des ingénieurs déclarent ne pas utiliser pleinement leurs compétences en Tunisie, ce qui renforce leur désir d’expatriation.
4. Un écosystème entrepreneurial fragile
Les ingénieurs tunisiens souhaitant entreprendre rencontrent de nombreux obstacles : manque de financement, lourdeur administrative et absence d’un cadre réglementaire attractif. En conséquence, beaucoup choisissent de créer leurs start-ups à l’étranger.
5. La quête d'une meilleure qualité de vie
Au-delà des condition de travail , L'une des principales raisons de la fuite des talents est la recherche d'une meilleure qualité de vie, particulièrement face à la hausse des prix des produits de première nécessité, à la dégradation des infrastructures, à la diminution de l'accès aux soins de santé et à la qualité du système éducatif. De nombreux Talents, confrontés à des salaires peu compétitifs et à des conditions de vie de plus en plus difficiles, choisissent de quitter la Tunisie pour des opportunités offrant un meilleur pouvoir d'achat, des infrastructures modernes, un accès à des soins de qualité et un système éducatif performant. Cette quête de qualité de vie, qui englobe des aspects économiques, sociaux et personnels, constitue un moteur majeur de la fuite des cerveaux.
Pour freiner l’exode des compétences et renforcer l’attractivité du marché de l’emploi tunisien, il est essentiel de mettre en place des solutions concrètes adaptées aux attentes des Talents. Une approche globale, combinant revalorisation salariale, amélioration des conditions de travail et perspectives de développement, peut contribuer à réduire significativement le turnover. Voici les principales stratégies à adopter :
1. Améliorer les conditions salariales et les avantages
2. Offrir des perspectives de carrière attractives
3. Améliorer la qualité de vie au travail (QVT)
4. Renforcer l’attractivité du pays pour les talents
5. Améliorer la qualité de vie dans le pays
Il est crucial d'investir dans l'amélioration des infrastructures, en modernisant les transports et en rénovant les établissements publics . Parallèlement, des réformes doivent être entreprises dans le secteur de la santé pour garantir des soins de qualité accessibles à tous, en améliorant les infrastructures hospitalières et en formant davantage de professionnels de santé. L'État devrait également œuvrer à la révision du système éducatif, en renforçant l'enseignement public, en favorisant l'innovation dans les programmes scolaires . D'un point de vue économique, il est nécessaire d'améliorer le pouvoir d'achat des citoyens par une politique de contrôle des prix, de soutien aux revenus des plus vulnérables et d'incitation à la création d'opportunités attractives, notamment dans les secteurs innovants.
La fidélisation des Talents en Tunisie ne peut se limiter à des mesures isolées. Il est urgent d’adopter une stratégie intégrée, combinant amélioration des conditions de travail, revalorisation salariale, perspectives d’évolution et attractivité du pays. Les entreprises tunisiennes qui investiront dans ces leviers auront un avantage compétitif majeur. À défaut, la fuite des cerveaux continuera d’affaiblir la compétitivité du pays. La Tunisie a tous les atouts pour devenir un hub de talents en Afrique du Nord. Il est temps d’agir pour transformer ce défi en opportunité !
Sources :